Le Dernier village

Mercure de France, 1946
Roman

Le Dernier village - Mercure de France 1946
Le Dernier village - Mercure de France 1946

Ce roman a été écrit, à Montauban, pendant la « période du silence ». Chamson a fait partie des grandes voix qui se sont tues pendant la guerre. Mais s’il refuse de publier, il continue à produire, dans un esprit « testamentaire », notamment Le Dernier village sur lequel il travaille, dès 1941. Dans cet ouvrage, il met en scène des fuyards de la retraite de 40 qui se retrouvent dans un village au sud de la Loire. Des officiers ont décidé de le défendre : le capitaine Girard et le lieutenant Rabaud croient encore à la nécessité du combat. Ils rassemblent les hommes en section et leur ordonnent de défendre le « dernier village ».

À propos de …

Ce roman est publié, en édition séparée, en 1946, après Le Puits des miracles, alors qu’il a été écrit avant. Il s’ouvre sur la dédicace suivante : « À mes camarades de 39-40 et de 44-45 – À la mémoire de notre compagnon d’armes mort torturé par la Gestapo, le capitaine Varlin de ce livre. » C’est dire à quel point Chamson puise dans sa mémoire et son vécu personnel. Le livre tire son origine « de la guerre et du désastre de notre armée », de « cette expérience encore brûlante ». (Devenir ce qu’on est)

La 1ère partie du livre, constituée par le récit proprement dit, est directement inspirée des réalités de la guerre – elle est « sans mensonges », écrit Chamson. La seconde, émaillée de « tentatives de jugements », lui « semble manquée. Elle ne pouvait pas être réussie mais elle a la valeur d’un témoignage. » (Devenir ce qu’on est). La question posée porte sur les moyens qu’il aurait fallu mettre en place pour éviter la débâcle. La réflexion, d’ordre politique, renvoie aux valeurs républicaines portées par Rabaud ; celui-ci incarne, de manière évidente, les idées de Chamson qui lui prête son parcours (génération épargnée par la guerre de 14, pacifisme, horreur du 6 février, engagement). Rabaud était aussi le nom du héros de La Galère et il évoque Rabaut Saint-Étienne, figure majeure du protestantisme. Autour du lieutenant, gravitent des hommes qui, par leurs réactions aux ordres de repli, puis de capitulation, préfigurent la répartition en collaborateurs et résistants. Ce roman est marqué par l’indignation mais aussi l’espoir, déjà porté par Écrit en 40.

Chamson par …

Chamson (Devenir ce qu’on est, 1959) :

« C’est un nouveau labeur que celui de l’écrivain qui ne pense pas à publier et ne se confie qu’aux rares amis qui partagent sa solitude. Sa voix change de ton, comme il arrive à ceux qui parlent dans la nuit. Mais cette nuit était peuplée de présences ; Huyghe, Sterling, Bayrou et, de temps en temps, Pierre Bost, Jean Guéhenno et Jacques Jaujard venu de Paris. »

Chamson (Écrit en 40, 1944) :

« J’ai vu des officiers fuir avec des femmes dans les voitures qui devaient les conduire à leur poste. J’ai vu des chefs oublier tous leurs devoirs et transformer en saturnales l’effondrement de la patrie. J’ai vu des soldats prisonniers, emportés par le souffle du néant, qui conservaient leurs bidons de vin et leurs masques, mais jetaient leurs armes. J’ai vu des femmes courir au-devant des soldats en retraite pour implorer des nouvelles d’un mari et qui ouvraient leurs jupes à celui qui voulait bien s’arrêter auprès d’elles. J’ai vu… Malgré cela, je ne crois pas que la France ait été souillée par cette débâcle et j’attends le jour… »

Éditions

Lettres Françaises, Paris : 6. 13. 20 et 27 octobre 1945, p. 6, 3 novembre 1945, p. 6.
Édition originale, Paris : Mercure de France, 1946.
Repris in Suite guerrière, Paris : Plon, 1975.
Repris in Les livres de la guerre, Paris : Omnibus, 2005.

Édition en langue étrangère

Aultima aldeia, traduit par Teisera de Aguilar, Lisbonne : Livres du Brésil, 1959.