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Le film Adeline Vénician
Le roman, adapté par Louis Velle et réalisé par Charles Paolini, a été diffusé sur la première chaîne en 1967.
Critique, publiée dans Le Monde :
Adeline Vénician
Par Janick Arbois
9 mars 1967
« Le risque était grand de voir l’ouvrage de M. André Chamson prendre à la télévision, avec la simplification qu’entraîne souvent le passage du livre au film, le style un peu languissant du roman pour les veillées des chaumières.
Tous les éléments, personnages et décors étaient en place : une veuve pieuse, une orpheline romantique, une noble demeure de famille et une servante au grand cœur. On pouvait, à l’inverse, insister lourdement sur la description psychologique de la folie qui s’empare progressivement de la jeune Adeline. L’adaptateur Louis Velle et le réalisateur Charles Paolini ont sans cesse oscillé entre ces deux pôles, sans céder complètement à leur double et dangereuse attraction. Ils sont parvenus, sans encombrer le film de discours pédants, à évoquer le vrai climat dans lequel cette histoire se développe, la doctrine cathare dont elle est discrètement mais profondément nourrie : « Toute matière est pourriture et danger et menace… tout est corruption », répète à sa fille Mme Vénician, qui manifeste plusieurs fois son indifférence et même son mépris pour la nourriture, son dégoût de la vie qui abîme et qui blesse.
Édith Scob, par son interprétation retenue et naturelle, a su rendre le personnage d’Adeline émouvant sans tomber dans la mièvrerie. Ce n’était pas facile non plus.
Dans cette œuvre délicate une faute de goût surprend : que le cousin venu de Chine joue de la trompette pour amuser ses parentes recluses, soit, mais qu’après deux airs militaires il se mette soudain à jouer la sonnerie aux morts en souvenir des nombreux défunts de la famille, c’est difficilement supportable. L’étrangeté d’Adeline et de sa mère a sa logique, mais elle ne doit pas, sous peine de ridicule, gagner les personnages extérieurs à leur univers clos. Quand des réfugiés sont accueillis au château pendant la guerre on sent très bien, au contraire, à quel point leur équilibre, leur caractère normal s’opposent à la folie d’Adeline. C’est un des plus émouvants moments du film parce que l’on sent que, pour Adeline, ce contact avec la vie réelle est sans espoir.
Produite par un centre régional, celui de Marseille sous la direction d’un réalisateur attaché à ce centre l’émission de Charles Paolini supporte la comparaison avec toutes les productions parisiennes. »
Distribution :
Edith Scob : Adeline Femme
Caroline Quin : Adeline Enfant
Michèle Lahaye : Mme Vénician
Jeanne Perez : Maria
Louis Velle : Le Cousin Jean
Michel Ruhl : Pierre Dejean
Marlène Jobert : Therese
Nicolas Velle : Armand
François Velle : Francois
Gérard Darrieu : Adrien
Résumé :
De 1929 à 1940, dans un château des Cévennes, l’éducation et les conditions de vie d’une petite fille inclinent l’adolescente qu’elle deviendra à vivre un amour imaginaire.
– Adeline Vénician vit dans la vieille demeure de Villeméjane entre sa mère et la servante Maria. Mme Vénician est veuve. C’est une « cathare » convaincue, qui élève Adeline dans le respect de la volonté de Dieu, le dégoût de la réalité, le mépris du monde et de ses injures. Elle refuse de l’envoyer à l’école, de peur des mauvaises fréquentations, et la tient éloignée de tout. Un beau jour, un étranger pénètre au château. C’est Jean, un cousin qui revient de Chine, les mains emplies de précieux cadeaux. Adeline l’accueille avec émerveillement…