Retour d’Espagne. Rien qu’un témoignage.

Grasset, 1937
Récit

Retour d'Espagne. Rien qu'un témoignage - Grasset 1937.
Retour d'Espagne. Rien qu'un témoignage - Grasset 1937.

L’Association internationale des écrivains pour la défense de la culture a tenu son Deuxième Congrès, en pleine guerre civile, à Madrid et Valence (où s’était réfugié le gouvernement républicain). Dans ce court ouvrage, daté de juillet 1937, Chamson ne rend pas compte du congrès même mais veut témoigner, à son retour d’Espagne, de ce qu’il a vu et vécu : « C’est de l’Espagne que je veux parler. C’est de cette extraordinaire et terrible expérience humaine qui se déroule, là-bas, dans la misère et la mort, l’allégresse et l’espérance. […] L’homme est aux prises avec un monstre et c’est ce monstre et ce combat que j’ai tenté de décrire. »

À propos de …

La France a été déchirée en deux camps par la guerre civile d’Espagne : les défenseurs des Républicains contre les tenants du pouvoir franquiste, ceux qui désiraient aider l’Espagne assiégée contre ceux qui prônaient la non-intervention. L’équipe de direction de Vendredi a soutenu les Républicains, dès août 1936, en ouvrant une souscription pour leur envoyer des camions avec des vivres et du matériel sanitaire mais elle est restée longtemps divisée sur la question de l’intervention. Chamson, quant à lui, a renoncé à son pacifisme, lors de la chute de Málaga, au début de l’année 1937. Dans ce contexte violemment passionné, Chamson désire témoigner et mobiliser l’opinion publique française et internationale dans Retour d’Espagne. Il soulignera, plus tard, « la modestie du propos » (Devenir ce qu’on est), eu égard aux romans écrits ultérieurement par Malraux et Hemingway. Ce n’était « rien qu’un témoignage » mais ce texte, publié dans Vendredi, lui paraissait nécessaire. Chamson se dépeint en témoin « épouvanté », venant de découvrir « les mécaniciens de la mort ». Dans la seconde partie, « Métamorphose de la guerre », il analyse le nouveau visage de la guerre. Pour lui, se trouvent aux prises sur le terrain espagnol les humains et la « guerre en soi », « la technique du massacre à l’état pur », l’homme contre la technologie, l’humain contre l’inhumain. Il voit aussi clairement que « la guerre qui se déroule en Espagne, joue tout entière, à pile ou face, la fatalité d’une guerre européenne. »

Chamson analyse également cette mutation de la guerre dans un discours, prononcé lors d’un autre congrès, sans doute en 1936, quand Chamson n’avait pas encore renoncé totalement au pacifisme. Il y évoque l’horreur des bombardements aériens.
Écouter le discours « Discours de Chamson contre la guerre » (3’26) ici.

Chamson par …

Chamson, Vendredi, n° 54, 13 novembre 1936 :

« Que des mères, portant leurs enfants dans leurs bras, tombent sous la mitraille ; que des petites filles, jouant dans un jardin, s’écroulent sous les éclats d’obus ; qu’une salle de classe ou qu’une crèche soit balayée par les bombes ; que de petits cadavres défigurés s‘entassent dans les morgues et le monde où nous vivons reste insensible. L’horreur ne semble plus pouvoir toucher les consciences. Il est inutile de faire l’appel de ceux qui devraient crier d’indignation et qui se taisent. Ils peuvent regarder le front de leurs enfants, sans y voir les stigmates des blessures dont meurent les enfants des autres. »

Roger Martin du Gard, 25 octobre 1937 :

« Mon cher ami, le rassemblement en ce petit – et très grand – volume de vos réactions en Espagne, constitue un ensemble saisissant, ramassé, plein de force et de justice. Je l’ai lu avec une émotion intense, celle que j’avais éprouvée à la publication de vos articles ; mais je sens aujourd’hui que l’importance de ce témoignage dépasse de beaucoup celle d’un événement pris sur le vif et rendu avec précision. La pensée maîtresse, l’idée que la guerre surgit avec un nouveau et déroutant visage, comme un mécanisme d’apprenti-sorcier qui aurait échappé à son créateur remet en question la forme même qu’il faut donner à notre pacifisme, les notions usées de notre lutte contre l’Horreur. »

Éditions

Édition originale, Paris : Grasset, 1937.
Repris in Les Livres de la guerre, Paris : Omnibus, 2005.
Publié aussi in Vendredi, n° 90, 23 juillet 1937.

Édition en langue étrangère

Al volver de España, un testimonio, Barcelona : Ediciones españolas, 1937.