Comme une pierre qui tombe

Gallimard, 1964
Roman

Comme une pierre qui tombe - Gallimard 1964
Comme une pierre qui tombe - Gallimard 1964
Comment un jeune homme brillant et ayant tout pour réussir sa vie finit par se détruire avec férocité ? Voici la question que pose ce roman puissant et très personnel d’André Chamson.
L’art du romancier donne à cette interrogation toute son ampleur et son intensité, en renvoyant à la racine du mal : la guerre de 14 et les 42 mois passés sur le front, traumatisme dont le héros ne se relèvera pas.

Chamson dépeint une chute inexorable, un lent avilissement, avec parfois, quelques éclairs de lucidité foudroyante. Ce personnage d’alcoolique qui fut un des espoirs du canton, promis à la députation ou à la carrière littéraire, garde même dans ces moments les plus lamentables une certaine forme de grandeur, un sens de la formule, un goût des mots, qui permet à l’auteur de déployer une virtuosité brutale qui n’est pas sans faire penser à celle d’un Céline. Roman sombre mais au ton libre, aux idées riches et qui pourrait se résumer dans cette question finale : à quels fils invisibles tient ce que l’on nomme un destin ?

À propos de …

Le ton de ce roman est celui d’un récit, d’une histoire personnelle et finalement, de la chronique d’une blessure. Chamson n’est encore qu’un enfant quand il rencontre ce jeune homme. Et c’est ce jeune homme qui l’introduit dans « le monde merveilleux de la connaissance », qui lui fait découvrir l’Histoire à travers celle de leur ville, de leur région, de leurs ancêtres. On reconnait dès leur première conversation nombre de thèmes qui irriguent l’œuvre de Chamson. Le petit garçon rêve son ambition à travers celle du jeune homme. On comprend progressivement l’importance déterminante de cette rencontre pour Chamson, comment elle a pu orienter sa vie. Puis vient la guerre de 14. À partir de ce traumatisme qui les éloigne durablement, la différence d’âge se fait de plus en plus négligeable et ils deviennent l’un pour l’autre des doubles en négatif. Tragique, humain, émouvant, empli de souffle et d’ombre, ce roman est une clef de lecture précieuse pour comprendre le parcours de Chamson et son concept de « l’homme contre l’Histoire ».

Chamson par …

Pierre Henri Simon : , « Langage et destin », Diagnostic de la littérature française, La Renaissance du livre, 1966, p. 215.

 « La réussite est incontestable. Comme une pierre qui tombe ne cesse de requérir l’attention, tantôt par le brio, tantôt par l’émotion, tantôt par l’intérêt d’un cas psychologique remarquablement suivi. »

Pierre Bost, lettre du 12 juillet 1964 :
« Ton Jean Manuel qui enjambe les années et les guerres et tant de choses, est présent comme un homme et comme un récit. »

André Chamson, « Avant-propos » de Comme une pierre qui tombe :
« Comme une pierre qui tombe ? N’est-ce pas le symbole le plus simple du mythe de la chute et l’histoire de Jean-Manuel n’est-elle pas comme un écho affaibli de ce mythe à travers lequel, depuis des millénaires et, sans doute, pour longtemps encore, les hommes ont cherché ou chercheront une explication de leur destin.
En réalité, l’image est peut-être trop violente pour bien exprimer ce qu’elle veut dire. Une pierre tombe trop droit et trop vite. La chute de Jean-Manuel est plutôt semblable à celle d’une feuille morte qu’à celle de la pierre qui siffle en fendant l’espace. Mais, feuille ou pierre, ce n’est pas l’objet qui tombe qui importe. Feuille ou pierre, l’homme perdu plonge dans l’abîme et c’est cet abîme qu’il faut mesurer. »

 

Éditions

Édition originale, Paris : Gallimard, 1964.
Repris in Suite pathétique, Paris : Plon, 1969.